BILLY CRAIN : Broken Things (2017)
Billy Crain ne laisse pas ses aficionados sur leur faim. Depuis 2010, parution de son premier album solo "Skeletons In The Closet", Billy est très fécond. S’ensuivent les albums "Creole Shoes" (2012), "Silent Roar" (2014), "Family Matters" (2015), "Hard Places" (2016) et ce Broken Things dernier en date, composé de dix titres. Billy Crain s'est forgé au gré du temps son propre style, rock d'obédience chrétienne teinté de country, folk,rock et rock sudiste au registre assez aérien, toujours très agréable à l'oreille, un véritable travail de fourmi niveau osmose des instruments piano/basse/batterie et guitares. À son écoute, on pense aux grands « songwriters » américains Tom Petty, John Mellencamp, John Hiatt : Billy Crain fait partie de cette trempe avec en plus l'art d'être multi-instrumentiste. Il le prouve sur cet album très abouti, avec pour démarrer un titre retentissant "The Bible And The Gun", une véritable perle, aux changements de rythme élaborés, où s'illustre la céleste guitare de Billy. Il en est de même sur "Skin And Bones". Une bouffée d'harmonies de guitare tient bien en haleine sur "I like Broken Things". "Orphan" se présente avec une structure assez progressive, "Rock Paper Scissors" sautille de joie et d'allégresse, mais c'est surtout le titre allmannien "Skydog" qui résume le mieux cet album tournant à la démonstration par ses exquises harmonies de guitare. Par moment, on pense aussi à la période Henry Paul Band et Outlaws de Billy. La suite est du même tonneau, du bien joué, bien enregistré et mixé avec un soin maniaque par le maître Billy Crain. On ne s'ennuie pas une seconde, ça défile avec grâce, album d’où découle du pur bonheur pour toute oreille attentive à la magnificence.
Jacques Dersigny
Billy Crain jouera-t-il à nouveau du « Southern Rock » ? Difficile de répondre ! Son univers musical est bien particulier et semble s’orienter de plus en plus vers la pop music mais toujours avec la guitare en fil conducteur. Humainement, il reste fidèle à lui-même, toujours prêt à tendre la main à son prochain. En 2017, il s’est déplacé au Honduras pour aider un orphelinat et les recettes des ventes de son dernier disque seront intégralement reversées à cet établissement. Musicalement, il demeure un grand guitariste et un immense compositeur, comme le démontre ce magistral « Broken things » qui peut légèrement surprendre à la première écoute tant Billy mélange allègrement le rock et la pop. Mais quand il sort sa six-cordes, ça fait vraiment mal ! « The bible and the gun » est l’exemple parfait de cette ambivalence : des couplets à la rythmique entêtante sur un tempo moyen, des refrains mélodiques et un solo de guitare final hallucinant dans un esprit sudiste. La belle chanson « Skin and bones » sonne plutôt comme de la pop anglaise avec un solo final impressionnant de musicalité. Encore de la pop avec « I like broken things » qui s’achève par un superbe solo. Billy parle de son amour des vieux objets et cite même son défunt frère dans un couplet en forme de clin d’œil : « I play my brother’s Les Paul, it looks like it has been to a fire » (je joue sur la Les Paul de mon frère, on dirait qu’elle est passée dans le feu »). « Rock paper scissors » s’apparente à une ballade americana rapide avec une montée d’accords à la Bruce Springsteen, des refrains rock et un solo final typique du style de Billy dans sa période Henry Paul Band. Sur « Shark heart », le cocktail rock sudiste/pop se révèle très intéressant. En prime, on a droit à une guitare hurlante qui tue et à un beau break (une montée harmonique digne d’un morceau de musique classique). Il faut également signaler la furieuse démonstration de gratte sur « Orphan » (dont les refrains rappellent un peu le 38 Special époque FM) et « Skull of the Mayans » ainsi que le final à la tierce dans le style des Outlaws sur « Somewhere under the rainbow ». Et puis, Billy laisse s’exprimer son talent poétique avec « Velvet tears » (une chanson inspirée par la mort du cheval favori de sa femme) : « When a horse cries velvet tears, he knows his time is done here » (« Quand un cheval pleure des larmes de velours, il sait que son temps est fini ici »). Un très beau moment ! Tous ces morceaux sont donc très satisfaisants et montrent Billy en totale communion avec son instrument. Mais ce n’est pas fini ! L’émotion atteint des sommets avec « Skydog », une ballade sudiste au rythme syncopé qui rend hommage au regretté Duane Allman et dans laquelle Billy cite quelques titres des Allman Brothers. Tout y est : des refrains splendides rehaussés d’un fond de cordes, un solo mélodique à pleurer et un final à la tierce dans l’esprit de l’Allman Brothers Band. On sent que Billy a composé avec le cœur, sans aucune arrière-pensée, mais ça pourrait cartonner en radio sans problème. Là, Billy donne le coup de grâce et met tout le monde d’accord. Il restitue l’ambiance Allman sans la copier, simplement avec sa touche personnelle. Sa guitare n’a pas oublié la route du Dixieland ! Ceci répond donc partiellement à la question du début. Billy Crain jouera encore du « Southern Rock »… de temps en temps, quand il en aura envie. Avec son dernier album, il confirme son orientation pop mais il prouve aussi son statut de compositeur talentueux et de guitariste magique. Il n’oublie pas non plus ses racines avec « Skydog », merveilleuse chanson qui justifie à elle seule l’achat de ce disque étincelant. Pour tes chansons envoûtantes… Pour tes solos flamboyants… Et pour ce petit « retour aux sources » avec « Skydog », merci à toi, Billy !
Olivier Aubry